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10 mars 2014 1 10 /03 /mars /2014 10:15

 

« L’idée de l’Europe est incontestée, mais l’idée est devenue l’administration et les gens prennent l’administration pour l’idée ». Wim Wenders

L’Europe est comme ces conjoints dont on a divorcé, on ne voit que leurs défauts, on les déteste avec d’autant plus de force qu’on a espéré autrefois les aimer toute la vie. On finit par oublier qu’un jour on a été séduit et passionné.

Parfois il faudrait avoir la sagesse de comparer pour se rassurer. Comparer avec avant (Existe-t-il un continent où plus de sang a coulé que sur le nôtre ? L’Asie ?) Comparer avec ailleurs. Ailleurs, où lorsque les peuples n’en peuvent plus de vivre ensemble, les séparations se passent très mal. L’Afrique regorge d’exemples. L’éclatement de la Yougoslavie (pas dans l’Europe politique) n’est pas si vieux. Les différents entre Ukrainiens de l’Est et de l’Ouest ne sont pas partis pour se régler pacifiquement.

Alors oui, le grand espace économique n’est vraiment pas ce dont on aurait pu rêver au début de la construction. Chassé par la porte d’un référendum français, il est revenu en catimini par la fenêtre. On voudrait une puissance qui pèse au niveau international, on n’a que des Etats égoïstes qui se concurrencent à coup de dumping fiscal. On voudrait un progrès social commun, des lois qui tirent les peuples vers le haut, vers un meilleur partage des richesses, on n’a que des boutiquiers qui règlementent le diamètre des saucisses, mais refusent que la provenance de la viande qui les compose figure sur les étiquettes. On voudrait de grands leaders charismatiques et inspirés issus d’un parlement doté de vrais pouvoirs, on n’a que de ternes apparatchiks sécrétés par une bureaucratie opaque.

Alors la tentation est grande de revenir en arrière. « C’était mieux avant », à l’époque du franc dévaluable à merci, des douaniers sur les frontières, de la souveraineté nationale et des curés en soutane et béret basque. Quand on n’avait pas de chômage et qu’on se sentait chez nous. C’est un peu ce que désirent les Suisses (du moins une partie d’entre eux), des Suisses qui inspirent toute l’extrême droite européenne, des Suisses qui pourraient s’exclamer « Charbonnier est maître chez lui », à la manière d’un Jean-Marie Le Pen. Sauf que le monde a changé, et que la flèche du temps fait que l’Histoire ne revient jamais en arrière.

Je préfère rester dans cette Europe imparfaite, si impitoyable avec ses travailleurs considérés comme des variables d’ajustement et que les entreprises craignent toujours de payer trop cher, si accommodante avec ses banques et ses fraudeurs, si désespérément pusillanime chaque fois qu’une crise internationale se profile à l’horizon. Améliorons la, changeons la plutôt que de la briser en morceaux. Parce que même s’il existe en son sein des Flamands qui rêvent de se séparer des Wallons, des Ecossais fatigués d’être des citoyens britanniques et des Basques qui ne se sentent ni Français ni Espagnols,  les divorces qui pourraient avoir lieu ont plus de chance de se faire à la tchécoslovaque plutôt qu’à la yougoslave ; à l’amiable ; sans effusion de sang. L’Europe nous a apporté au moins cela, et cela n’a pas de prix.    

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